C'est fait, votre premier jet est écrit. Vous allez attaquer les corrections de fond et de forme avant d’envoyer votre manuscrit à un éditeur. Avant cela, vous faites reposer votre texte afin de le découvrir avec des yeux neufs. C'est une très bonne chose. Mais en attendant, vous vous ennuyez. Je vous propose alors de vérifier trois petits points qui sont essentiels à la bonne appréciation d'un roman par un éditeur.
Vous l'avez certainement remarqué, si vous ouvrez un roman, vous lisez immanquablement la première phrase. C'est elle qui d'emblée va nous retenir ou nous faire fuir. Plus que la simple amorce d'un texte, cette première phrase ouvre la porte de l'imaginaire d'un auteur. Elle n'est pas forcément belle, ni d'une originalité folle. Mais son rôle est toujours primordial. Elle symbolise le seuil du livre, la main tendue de l'auteur au lecteur, la porte d'entrée d'un nouveau monde, le passage vers un univers différent. Quand un auteur est capable, dès les premiers mots, d'aiguillonner notre envie de lire la phrase suivante, c'est gagné. On abandonne rarement ce que l'on est en train de lire.
Quelques exemples :
" Je vois..., dit le vampire d'un air pensif. Puis, lentement, il traversa la pièce pour aller se poster à la fenêtre." Anne Rice, Entretien avec un vampire.
La première phrase ici est très simple. L'auteur s'en tient aux faits. On comprend que nous sommes au milieu d'une discussion entre quelqu'un et... un vampire. Cette première phrase ne dit rien et pourtant elle dit tout. Le "je vois" suivi de trois points de suspension est percutant. Le vampire est dubitatif. Pourquoi? Et pourquoi quelqu'un discute-t-on avec un vampire? Ces quelques mots représentent une mèche qui met le feu à l'intérêt du lecteur. Vérifiez votre première phrase. Sera-t-elle "de mèche" avec vos lecteurs ?
" La locomotive dit entendre un rauque sifflement : on était arrivé au Semmering". Stefan Zweig, Brûlant secret.
Encore un exemple d'une première phrase simple mais qui nous projette de suite dans l'action. Quand vous ne savez pas comment démarrer, vous pouvez employer une description de l'instant ou d'un lieu afin de planter le décor.
"Jeanne, ayant fini ses valises, s'approcha de la fenêtre, mais la pluie ne cessait pas".
Même phrase simple. Le décor est planté. Une certaine Jeanne a fini ses valises. Part-elle? Revient-elle de quelque part? L'intérêt est placé subtilement. A nous de continuer notre lecture pour en savoir davantage.
Vous l'avez compris, je suis convaincue qu'il n'est pas obligatoire d'écrire une première phase originale. Mais celle-ci doit être percutante, et donner aux lecteurs l'envie de continuer à tourner les pages.
2/ Vérifiez la première page.
La première page d'un roman doit donner le ton, donner le style, donner envie de lire la suite. Et-ce que votre première page est suffisamment captivante? Est-ce qu'on attend que ça démarre? Trop souvent, on plante le décor et les personnages en oubliant qu'il faut employer l'imagination des lecteurs dès les premières lignes. Si c'est un roman d'horreur, il faut s'empresser de créer la terreur dans le cerveau des lecteurs. Si c'est un roman d'amour, il faut vite faire vibrer leur fibre sentimentale, et ainsi de suite selon le genre de roman.
Je reprends le livre d'Anne Rice et j'examine les quelques lignes extraites de la première page.
"- Je vois..., dit le vampire d'un air pensif.
Puis, lentement, il traversa la pièce pour aller se poster à la fenêtre. Il y resta un long moment ; sa silhouette se découpait sur la clarté diffuse qui émanait de Divisadero Street et sur les rayons de phares des automobiles. L'ameublement de la pièce apparaissait maintenant plus clairement au jeune homme : la table de chêne ronde, les chaises. Contre l'un des murs il y avait un lavabo surmonté d'un miroir. Il posa sa serviette sur la table et attendit.
- De combien de bandes disposez-vous ? demanda le vampire en tournant la tête de manière à offrir son profil au regard du jeune homme. Assez pour l'histoire de toute une vie?
- Certainement, si c'est une vie intéressante. Quand j'ai de la chance, il m'arrive d'interviewer jusqu'à trois ou quatre personnes le même soir. Mais il faut que l'histoire en vaille la peine. C'est normal, non?
- Parfaitement normal, répondit le vampire. Eh bien, cela me ferait plaisir de vous raconter ma vie, vraiment plaisir.
- Très bien! dit le jeune homme.
Il sortit vivement de sa serviette un petit magnétophone à cassette, vérifia l'état de la bande et des piles. Il allait parler quand le vampire l'interrompit brutalement :
- Nous ne pouvons pas commencer comme cela. Votre appareil est-il prêt?
- Oui;
- Alors,asseyez-vous. Je vais allumer le plafonnier.
- Mais je croyais que les vampires n'aimaient pas la lumière ! s'exclama le jeune homme. Si vous estimez que l'obscurité ajoute à l'atmosphère...
Il s'arrêta au milieu de sa phrase. "
Alors ? Qu'en pensez-vous ? Après des premiers mots accrocheurs, Anne Rice trouve le moyen de retenir le lecteur qui lit cette première page. On entre directement dans le vif du sujet : c'est bien l'histoire d'un vampire qui va raconter sa vie. Elle évite soigneusement les clichés inhérents au vampire : " Mais je croyais que les vampires n'aimaient pas la lumière ! s'exclama le jeune homme". Je trouve que cette première page nous interpelle et nous intrigue : que va bien pouvoir raconter ce vampire?
3/ Vérifiez le premier chapitre.
Un premier chapitre est réussi lorsqu'il concrétise deux chose importantes : informer sur le contexte et les personnages et faire démarrer l'action. C'est d'ailleurs le chapitre le plus casse-cou à rédiger. Notamment si vous envisagez d'écrire un roman scientifique ou de science-fiction. Puisqu'il faut à la fois vulgariser beaucoup d'informations pour éclairer les lecteurs et mettre de l'action pour les retenir.
"- Je vois..., dit le vampire d'un air pensif.
Puis, lentement, il traversa la pièce pour aller se poster à la fenêtre. Il y resta un long moment ; sa silhouette se découpait sur la clarté diffuse qui émanait de Divisadero Street et sur les rayons de phares des automobiles. L'ameublement de la pièce apparaissait maintenant plus clairement au jeune homme : la table de chêne ronde, les chaises. Contre l'un des murs il y avait un lavabo surmonté d'un miroir. Il posa sa serviette sur la table et attendit.
- De combien de bandes disposez-vous ? demanda le vampire en tournant la tête de manière à offrir son profil au regard du jeune homme. Assez pour l'histoire de toute une vie?
- Certainement, si c'est une vie intéressante. Quand j'ai de la chance, il m'arrive d'interviewer jusqu'à trois ou quatre personnes le même soir. Mais il faut que l'histoire en vaille la peine. C'est normal, non?
- Parfaitement normal, répondit le vampire. Eh bien, cela me ferait plaisir de vous raconter ma vie, vraiment plaisir.
- Très bien! dit le jeune homme.
Il sortit vivement de sa serviette un petit magnétophone à cassette, vérifia l'état de la bande et des piles. Il allait parler quand le vampire l'interrompit brutalement :
- Nous ne pouvons pas commencer comme cela. Votre appareil est-il prêt?
- Oui;
- Alors,asseyez-vous. Je vais allumer le plafonnier.
- Mais je croyais que les vampires n'aimaient pas la lumière ! s'exclama le jeune homme. Si vous estimez que l'obscurité ajoute à l'atmosphère...
Il s'arrêta au milieu de sa phrase. "
Alors ? Qu'en pensez-vous ? Après des premiers mots accrocheurs, Anne Rice trouve le moyen de retenir le lecteur qui lit cette première page. On entre directement dans le vif du sujet : c'est bien l'histoire d'un vampire qui va raconter sa vie. Elle évite soigneusement les clichés inhérents au vampire : " Mais je croyais que les vampires n'aimaient pas la lumière ! s'exclama le jeune homme". Je trouve que cette première page nous interpelle et nous intrigue : que va bien pouvoir raconter ce vampire?
3/ Vérifiez le premier chapitre.
Un premier chapitre est réussi lorsqu'il concrétise deux chose importantes : informer sur le contexte et les personnages et faire démarrer l'action. C'est d'ailleurs le chapitre le plus casse-cou à rédiger. Notamment si vous envisagez d'écrire un roman scientifique ou de science-fiction. Puisqu'il faut à la fois vulgariser beaucoup d'informations pour éclairer les lecteurs et mettre de l'action pour les retenir.
Que faire si la première phrase, la première page ou le premier chapitre ne conviennent pas après relecture?
- La première phrase : elle est facilement modifiable. Regardez les phrases qui suivent ; voyez si vous pouvez modifier le style ou seulement quelques mots... En un mot : faites du rafistolage.
- La première page : c'est un peu plus compliqué. Si vous vous rendez compte qu'elle ne convient plus, pensez à aller voir plus loin dans votre manuscrit, il serait très étonnant que vous ne trouviez pas un paragraphe qui ferait parfaitement l'affaire pour attaquer.
- Le premier chapitre : Aïe ! Là, ça devient plus compliqué ! Il faudra le réécrire. Une petite astuce pour le rédiger d'une façon plus digeste : éviter de donner, dès le début, toutes les informations sur votre personnage principal. Créez plus loin des circonstances qui vous permettront d'apporter des renseignements complémentaires.
J'espère que ces informations vous ont été utiles.
A Bientôt sur le Blog !
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